Silences

La Lagune de Venise, Joel Pinson

La Lagune de Venise, Joel Pinson

La poésie est un rythme intérieur, une lumière, une pause (suite).

Quelques extraits de mes lectures récentes, quelques mots inspirés aussi:

 

Il meurt lentement

Il meurt lentement
celui qui ne voyage pas,
celui qui ne lit pas,
celui qui n’écoute pas de musique,
celui qui ne sait pas trouver grâce à ses yeux.

Il meurt lentement
celui qui détruit son amour-propre,
celui qui ne se laisse jamais aider.

Il meurt lentement
celui qui devient esclave de l’habitude
refaisant tous les jours les mêmes chemins,
celui qui ne change jamais de repère,
ne se risque jamais à changer la couleur de ses vêtements
ou qui ne parle jamais à un inconnu.

Il meurt lentement
celui qui évite la passion
et son tourbillon d’émotions,
celles qui redonnent la lumière dans les yeux
et réparent les cœurs blessés.

Il meurt lentement
celui qui ne change pas de cap
lorsqu’il est malheureux au travail ou en amour,
celui qui ne prend pas de risques pour réaliser ses rêves,
celui qui, pas une seule fois dans sa vie,
n’a fui les conseils sensés.

Vis maintenant !
Ne te laisse pas mourir lentement !
Ne te prive pas d’être heureux !

Pablo Neruda

 

Paysage

Le soleil rasait les montagnes,
Des ombres géantes parcouraient le paysage,
Rien n’était à sa place,
Sauf le silence givré.
jp

 

Les pas

Tes pas, enfants de mon silence,
Saintement, lentement placés,
Vers le lit de ma vigilance
Procèdent muets et glacés.

Personne pure, ombre divine,
Qu’ils sont doux, tes pas retenus !
Dieux !… tous les dons que je devine
Viennent à moi sur ces pieds nus !

Si, de tes lèvres avancées,
Tu prépares pour l’apaiser,
A l’habitant de mes pensées
La nourriture d’un baiser,

Ne hâte pas cet acte tendre,
Douceur d’être et de n’être pas,
Car j’ai vécu de vous attendre,
Et mon coeur n’était que vos pas.

Paul Valéry

 

Autre paysage

Le maïs crissait sans raison,
L’aube du soleil caressait les nuages,
Un ciel exsangue enveloppait la montagne:
L’enfant de mon silence m’observait attentivement. 

jp 

Lettres à la bien-aimée (extrait)

Croiser ta voix c’est entendre, au loin, un ruisseau.
C’est aller y chercher de l’eau, t’en donner
Et seulement du bout des doigts, connaître la soif.

Thierry Metz

 

Harmonie du soir

Voici venir les temps où vibrant sur sa tige
Chaque fleur s’évapore ainsi qu’un encensoir;
Les sons et les parfums tournent dans l’air du soir;
Valse mélancolique et langoureux vertige!

Charles Baudelaire

 

La compagne

La douleur est une compagne possessive,
Elle décide de tout, n’abandonne rien.
Lorsqu’on croit qu’elle s’est éloignée,
Sa main ferme surgit.

 jp

Photo: Lagune de Venise, Joel Pinson